internet projects
2001 : P-O-S / Plan d’Occupation des Sites, site Internet en association avec la Fondation de France - programme Initiatives d’artistes, Anastassia Makridou-Bretonneau – commissaire de l’exposition, en collaboration avec l’association Eternal Network et Anne-Laure Even, projet collectif en réseau avec B. Calet, S. Engramer et F. Tétart, V. Protat et DJ Olive, Gregor Asch, en collaboration avec Transcultures, Bruxelles, le Centre Chorégraphique National de Tours, la Maison des associations Culturelles de Tours, l’Ecole supérieure des beaux-arts de Tours et la Ville de Tours / http://www.p-o-s.org
Initié par Bernard Calet, Sammy Engramer, protaTTrioreau et Frédéric Tétart, « Plan d’Occupation des Sites » est un laboratoire artistique permanent sur l’espace urbain de la ville de Tours et de son agglomération. Son objectif : instaurer et développer une recherche sur l’appréhension de ce territoire du quotidien au-delà de son identité matérielle et statique. Déterritorialisée sur la toile, la dimension physique de la ville disparaît ici au profit d’espaces critiques et utopiques, de sites alternatifs. Trame, texture, carte, image, texte, son, la ville est traitée comme un matériau à la fois vivant et inerte, noble et dénaturé. Imaginer l’ailleurs dans l’ici, ouvrir l’ici à son ailleurs, cette démarche émet des hypothèses sur une autre lecture du réel et de ses composantes. Conçus à partir des modèles déambulatoires propres à l’hypertexte, les projets de chaque artiste se découvrent à travers des parcours disséminés et fragmentaires. La mutation rhizomatique de l’urbain contemporain trouve une transposition possible dans les nœuds, liens, déplacements et renvois du net. L’urbanisme du « Plan d’Occupation des Sites » se déploie ainsi grâce à la liberté des choix, des comportements et des désirs. Comme un champ de pensée et d’action qui nécessite et intègre la pensée et l’action de l’autre, des autres. Parce que faire, refaire, défaire la ville à travers des processus virtuels est une façon de la retrouver, de la comprendre, de la revendiquer.
Lieu prospectif, espace de projection, laboratoire de recherche, le site http://www.p-o-s.org est pensé comme évolutif, susceptible d’accueillir d’autres interventions d’artistes, autour de l’architecture, de la cité, de l’espace, de la perception et des N.T.I.C. Le site Internet trouve alors sa dimension de véritable espace critique.
http://www.p-o-s.org propose donc d’installer sur le réseau Internet une collectivité réelle, qui se définit à la fois à travers son inscription locale et tourangelle, mais aussi son ubiquité et son indépendance. Des enjeux plus larges se dessinent ici : faire valoir une autre culture du local, basée sur la participation plus que sur la consommation, et, en parallèle, garder une tension entre le réel et le virtuel. Investissant l’outil Internet sans aucune complaisance technologique, les artistes (Bernard Calet, Ewen Chardronnet, Sammy Engramer, Thierry Joseph, Frédéric Tétart, protaTTrioreau, …) proposent une sorte de parcours multiple, une déambulation aléatoire dans la ville de Tours, envisagée comme un site générique à travers sa virtualisation. Internet offre la possibilité de déplacer des éléments réels de la ville et de les mixer, de les mélanger avec d’autres dont les origines sont variées, pour redéfinir un autre espace, infiniment démultipliable et souple.
Le projet artistique du collectif http://www.p-o-s.org transforme le plan d’occupation des sols en plan d’occupation des sites ! Un lieu d’échanges et de recherche, sur Internet, autour des questions de l’espace urbain et de l’utopie.
Le site http://www.p-o-s.org propose un parcours multiple dans la ville de Tours, ponctué d’interventions artistiques qui portent un autres regard sur cet espace du quotidien. La configuration urbaine, comme l’usage et les fonctions des sites, cristallise les strates des évolutions sociales, politiques et économiques spécifiques à chaque ville. A Tours, dans le cadre du réaménagement de la ville, qui prévoit la création d’une ligne de tramway, Bernard Calet observe que les pavements des trottoirs de l’artère la plus commerçante dessinent des motifs identiques à ceux que l’on trouve dans les tapis. Il s’agit d’un rappel historique choisi par les habitants : Tours est une ville carrefour entre l’axe Nord / Sud et l’axe Nantes / Lyon. Pendant la Renaissance, ces axes constituaient la route de la soie. Déplacement, tressage, maillage, ces termes ne sont pas sans rappeler les notions de circulation et de passages propres à l’architecture d’Internet.
C’est à partir de ce motif que http://www.p-o-s.org est conçu, comme une extension de ce système microscopique du pavé tourangeau mais à une échelle planétaire de circulation macroscopique : celle d’Internet. L’armature du site reproduit ce système de maillage, reliant entre elles les interventions de chaque artiste tout en laissant ce système ouvert aux interventions futures. En déplaçant la trame du tapis vers des espaces périphériques de la ville, Bernard Calet introduit des décalages qui font sens dans le langage symbolique de l’urbanisme. Ces installations fragilisent les frontières entre espace public et espace privé, attribuant à ce cadre statique et décoratif la qualité du signe d’un espace de réception, d’un lieu d’accueil. Sammy Engramer s’intéresse également aux marges de la cité et imagine des stations vertes au sein des lotissements en expansion. Il repère des terrain à bâtir qu’il propose d’utilise comme des espaces de convivialité : aménagements de places, esplanades, lieux de vie collective…
protaTTrioreau intervient sur le mode du parasitage, par intrusion de panneaux publicitaires à l’intérieur d’autres propositions. Relevant d’une certaine esthétique du chantier, ces panneaux affichent des photographies prises pendant les travaux de la Rue Nationale. Il s’immiscent également dans l’espace sonore public en squattant, virtuellement, les haut-parleurs qui diffusent musique commerciale et slogans publicitaires les jours de grande braderie et d’émulation consumériste. Frédéric Tétart utilise des stratégies d’infraction dans les projets des autres artistes qui lui offrent des fragments de matière pour construire des architectures de fortune. Il joue ainsi sur les notions de propriété et de pouvoir qui régissent la morphologie de la ville comme l’espace d’Internet.
Du privé au collectif, http://www.p-o-s.org établit les conditions d’échange et de mobilité, de rencontre et de fragilité qui fondent la notion d’espace public. Le projet se situe ainsi au confluent de plusieurs problématiques actuelles, liées d’une part à l’aménagement urbain, et d’autre part au développement des nouvelles technologies. Il est possible de penser des utopies au présent, des utopies appliquées, avec une conception décomplexée de l’espace-temps, sans caution de l’ancien ni dictature du nouveau…